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PROPOSİTİON DE THÈME, POUR UNE RENCONTRE SURRÉALİSTE A İSTANBUL EN 2011
Face au prosaïsme, empêtré jusqu’à la moelle, dans ses signes agonisants, face à la barbarie capitaliste, apparemment triomphante, construire la dialectique poétique concrète de la destruction et de la création, au temps du danger de mort, qui souffle sur la nuque de l’humanité.
Tout le problème consiste à apprécier, précisément, comment le négatif le plus apparemment destructeur peux aider au dépassement (merveilleuse Aufhebung !) de situations apparemment sans issue.
Les rapports dialectiques entre destruction et création ont pris depuis quelques décennies une qualité toute particulière que nous pouvons mieux commencer à comprendre. En effet, nous nous sommes faits à l’idée que l’humanité, sans être absolument condamnée, voit sa survie, à court ou moyen terme, ne plus être assurée. Les risques ne peuvent être calculés car ils dépendent finalement surtout des luttes de l’humanité dans son ensemble, et aussi du hasard. Il s’agit pour les surréalistes et révolutionnaires sociaux de tirer des forces paradoxales de cet état de choses.
A) D’abord nous pouvons prendre une conscience plus collective et plus personnelle, plus vives et plus profondes, de réinventer entièrement les bases sur lesquelles cette humanité est aujourd’hui sommée d’agir et auxquelles elle résiste. Ces bases sont par exemple, du point de vue de l’esprit, un mépris autiste et pornographique de tout, un culte nihiliste du rien, une pulsion de mort non sublimée et provisoirement enkystée dans une perversion polymorphe, une religion de la performance et de la jouissance maximum exemptes de sens pour être compatible avec l’indifférence totale et l’ennuie chronique.
Il faut lire et relire le délire de Milton Friedman et surtout de son maître Friedrich Hayek (eux qui restent les grands gourous fantômes des puissants de ce monde, dominés par l’olympe des spéculateurs financiers) et qui surpassent de loin, en absurdité, les délires de « Mein Kampf ». Comme on le sait, la guerre totale de tous contre tous est conçue, par ce délire là, non plus comme un défaut guérissable ou passager ou contrôlable dans certain limite du capitalisme, mais comme le principe à vénérer avec la plus extrême dévotion. Le chaos devient la condition de l’équilibre parfait, cela nous est dit avec le plus grand sérieux, et sur le ton de ceux qui commandent et se font obéir.
Cet affaissement intellectuel massif des prêtres du Capital et la crise de légitimité peuvent nous aider à ressentir l’urgence, la liberté et la nécessité de préciser, radicaliser et concrétiser l’esprit de nos utopies.
B) Dialectiser les rapports entre notre pessimisme et notre optimisme.
D’une part, il n’est pas nécessaire d’espérer pour agir avec succès: le désespoir a souvent cet humour d’être plus efficace que l’espoir. Et, pour aller à l’essentiel, le surréalisme, la révolte, la lutte révolutionnaire, la poésie, la liberté, l’amour, valent pour eux- mêmes- y compris dans l’hypothèse où ces passions sont vouées à un échec total sur le plan des réalisations - parce que ces passions sont grandes, justes et belles !
Mais d’autre part, l’espoir est lui-même sublime, éclatant et précieux, l’espoir d’une certaine réalisation de ces passions, aussi improbable et aussi ténu soit-il. Ainsi, combien d’amoureux et d’amoureuses ont-ils rêvé de pouvoir effleurer, ne serait-ce qu’une fois ou une fois encore, les cheveux de l’être aimé ! Quelque chose d’analogue est à l’œuvre dans toutes nos passions. C’est pour cette raison (et non par un optimisme ridicule prêt à se plier à tous les pragmatismes) que nous ne devons pas abandonner l’espoir fou de la réciprocité dans l’amour, de l’accomplissement et du partage du merveilleux dans la création, de l’accouchement d’une humanité enfin libre, ne serait-ce que pour quelques jours, mais de préférence pour beaucoup plus longtemps, jusqu’à ce que cette humanité réconciliée cesse d’être (puisque ‘’tout ce qui est mérite de périr ‘’) pour disparaitre ou pour se métamorphoser en quelque chose de totalement inconnu, peut-être meilleur.
C) Enfin, l’actuel et criante panique humaine, latente ou déclarée, peut nous permettre de reconnaitre le fond essentiellement désespéré (mais tourné - malgré tout - vers l’espoir) de ces passions, dans les quelles le mouvement surréaliste, et chacun de nous, s’est reconnu.
Qu’est-ce, à l’origine, que toute création authentique, sinon dépense folle d’énergie en pure perte ?
Qu’est-ce que la naissance chez un individu de la passion amoureuse (et cette naissance peut durer toute la vie- les esprits engourdis pourront rire), sinon la reconnaissance que tout est vain, sinon la fulgurance d’une lueur qu’il semble tout à fait déraisonnable d’espérer atteindre ?
Qu’est-ce que la passion révolutionnaire poétique et/ou sociale, sinon un pari vers l’improbable,
pour un futur qui restera inconnaissable, parce que seulement « un autre monde possible », une autre vie sur terre, paraissent plus beaux, et plus justes, bien que toutes les précédentes tentatives aient échoué.
Ody Saban surréaliste turque et française & Thomas Mordant surréaliste de langue française et d’origine tsigane. Il y a quatre millions de tsiganes en Turquie ! Paris, le 28 novembre 2010
Extraits de « Signe Ascendant »
Texte d’André Breton 1947
« Pour moi la seule évidence au monde est commandée par le rapport spontané, extra-lucide, insolent, qui s’établit, dans certains conditions, entre telle chose et telle autre, que le sens commun retiendrait de confronter.
(…) une attention vitale tournée au possible vers la santé, le plaisir, la quiétude, la grâce rendue (…)
(…) ennemis mortels le dépréciatif et le dépressif.
(…) ‘’Une libellule rouge- arrachez lui les ailes- un piment’’ Bashō y substitua ‘’Un piment- mettez lui des ailes- une libellule rouge.’’ »
Wednesday, February 23, 2011
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